dimanche 21 février 2016

« Monsieur Klein » (1976) de Joseph Losey


Monsieur Klein est l'un des plus grands fims de Losey et l'un des meilleurs de Delon qui y est remarquable. Sans oublier les seconds rôles, exceptionnels : Jeanne Moreau, Jean Bouise, Suzanne Flon, Michel Lonsdale, Louis Seigner, Francine Bergé... et j'en passe. Tout contribue dans ce film, la photo de Gerry Fisher, les décors, la musique de Egisto Macchi, à apporter une atmosphère oppressante, glauque, suintante, quasi expressionniste. Le mal y rôde en permanence ainsi qu'un sentiment de malaise qui se faufile entre chaque plan, tout semblant s'enfoncer inexorablement vers un univers décadent et mortuaire, fait de décrépitude, d'isolement, prélude à une extermination programmée. Un labyrinthe où l'humain perd comme Klein peu à peu son identité pour ne plus être que son fantôme squelettique l'amenant progressivement à Dachau ou à Auschwitz. Chacun est Klein, devenant l'objet des bourreaux à travers le jeu pervers de la manipulation mentale qui conduit progressivement à la perte de l'identité, du moi, pour finir par succomber au processus de destruction orchestré par la machine d'anéantissement nazie. On pense au Testament du Dr Mabuse, à un monde devenu kafkaïen, diabolique, qui aboutit à cette séquence terrifiante et inouïe de réalisme de la rafle du Vel d'hiv. Rarement un film aura montré et avec un souci de précision exemplaire le processus d'infiltration du mal dans les consciences, quitte à en rendre le spectateur mortifié, pris au piège, scellé à double tour, cadenassé vers les convois de la mort. Qui est Klein ? Nous ? L'autre ? Celui qu'on cherche ? Qu'on chasse ? Qu'on persécute ? Et pourquoi lui ? Pourquoi pas nous ? C'est là toute la question posée par le film dont la seule réponse est que les auteurs ont voulu que nous soyons nous-mêmes les instruments de ce qu'ils dénonçaient.



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